En 2016, lorsque notre Président a démissionné du ministère de l’économie, la Une du journal français Libération du lendemain a titré de manière soignée « Macron, l’auto-entrepreneur », en référence au système français selon lequel les salariés sont assimilés aux entrepreneurs individuels britanniques, et en jouant évidemment sur l’idée qu’Emmanuel Macron venait de devenir politiquement « indépendant ». Mais, accessoirement, il a aussi contribué à populariser cette expression toute nouvelle, ainsi que l’idée que tout le monde devra peut-être désormais « travailler pour soi ».
L’auto-entrepreneur, une réponse au monde qui change…
Le monde est en train de changer, tout comme la position du travailleur salarié. Autrefois, les entreprises étaient responsables de l’employabilité de leurs travailleurs. C’étaient les entreprises qui – la plupart du temps – décidaient de ce que leurs travailleurs allaient faire et comment ils allaient progresser, assuraient leur formation et garantissaient la sécurité de l’emploi à long terme. Dans le modèle qui se développe lentement, ce sont les salariés qui vont prendre en charge à la fois leur propre employabilité durable, sur des contrats successifs ou parallèles, précaires ou non, et la formation, qu’il s’agisse d’ateliers individuels ou de cours professionnels. Même s’ils seront toujours des salariés, ils seront les agents les plus actifs dans la construction de leur propre carrière. Indépendamment de leur statut, ils sont donc, en quelque sorte, des auto-entrepreneurs.
Les inconvénients et avantages de l’auto-entreprenariat ?
Les inconvénients ? Moins de sécurité, de certitude, de stabilité, de confort, de direction et de visibilité…
Les avantages ? Plus d’opportunités, de liberté, d’indépendance, d’envergure et de temps pour faire ce que l’on veut.
Car, contrairement à ce que certains voudraient nous faire croire, l’évolution du modèle n’est pas seulement le reflet des temps difficiles, de l’instabilité organisationnelle et de l’insécurité de l’emploi. Elle reflète également un niveau plus élevé de maturité générale chez les individus, une plus grande capacité à subvenir à leurs besoins de manière indépendante, et un désir plus fort de liberté et d’épanouissement personnel. Les différentes réformes de la formation reflètent et encouragent tout cela en faisant de la formation professionnelle continue (appelée CPF en France) un compte personnel de formation qui est contrôlé par le salarié tout au long de sa carrière, et non plus par ses employeurs successifs. Elle se manifeste aussi à un autre niveau par l’appétit indéniable des jeunes hautement qualifiés pour les start-up à l’avenir incertain, plutôt que pour les entreprises établies qui suivent des chemins sans doute trop bien tracés.
Qu’on le veuille ou non, le travail indépendant est l’avenir, quelle que soit la forme qu’il prend pour chaque individu, le statut qu’il revêt et les entreprises qu’il touche.
Entrepreneurs, le monde nous appartient…
Il nous appartient donc, où que nous soyons, d’en mesurer les enjeux et d’en assumer les conséquences.
Vous êtes salarié ? C’est à chacun d’entre nous de se prendre en charge, de ne pas attendre d’une entreprise ce qu’elle n’est pas en mesure de donner, de reconnaître et de donner le meilleur de nous-mêmes, d’assumer la responsabilité de notre développement professionnel régulier…
Vous travaillez dans les RH ? C’est à des équipes dédiées qu’il revient de personnaliser les perspectives de chaque travailleur et d’imaginer de nouvelles façons de concilier les motivations des uns avec les exigences opérationnelles des autres…
Vous êtes manager ? Il appartient à chacun d’entre nous de soutenir les capacités entrepreneuriales de nos collaborateurs plutôt que de les soumettre, et d’offrir à tous des possibilités de progression plutôt que de ne donner des postes qu’aux meilleurs.
Dans la fameuse hiérarchie des besoins de Maslow, nous savons que progresser ainsi de la seule satisfaction des besoins de sécurité à la satisfaction des besoins d’accomplissement de soi est a priori un acquis majeur, sinon le scénario idéal. Il nous appartient à tous, chacun à notre manière, de faire en sorte que cette liberté soit synonyme de satisfaction, d’expression, d’innovation, de coopération – et non d’exploitation ou de paupérisme.